L’Europe du Nord connait tout au long du XIXe siècle une quête d’identité. Les revendications d’autonomie politique ainsi que culturelle amorcent le début du siècle suivant en Finlande. L’architecture finlandaise sera un des éléments propices à cette recherche d’identité nationale et amènera un art nouveau finlandais dont le romantisme national (Rainier p.61). C’est à ce tournant économique et stylistique que débutera la carrière de l’architecte, dessinateur, urbaniste et designer Alvar Aalto.
L’œuvre d’Alvar Aalto est considérée comme « véritable architecture qui a pour centre l’homme ». En d’autres mots, Aalto est considéré comme étant un humaniste de son temps. La conception des mobiliers qu’il conçoit pour l’intérieur de ses bâtiments vient appuyer cette pensée de mettre l’homme au centre de son environnement. Aalto s’intéressera au style fonctionnaliste, mais davantage au design organique.
« Il ne fait aucun doute qu’Aalto, avec sa préoccupation constante pour le milieu naturel, qu’il considérait dans une perspective humaniste, était un précurseur du mouvement écologiste moderne. »
– Goran Schildt (Table, p.8)
La Villa Mairea
La Villa Mairea est une maison de campagne luxueuse construite en 1938-39 qui se situe à Noormarkku en Finlande. Elle est d’ailleurs l’une de ses réalisations la plus connue de l’artiste. Les commanditaires du projet étaient un riche couple, Harry et Maire Gullichsen. La villa doit d’ailleurs son nom à cette dernière. Le domicile des Gullichsen est à l’origine une maison expérimentale et se trouve parmi les maisons ayant marqué l’histoire des maisons-manifestes du XXe siècle. Plusieurs innovations d’Aalto dans ce projet sont à l’origine du succès de la maison dont la fluidité entre l’espace intérieur-extérieur, par le doublement de la sortie jardin-cour grâce à un système de porte coulissante. Un autre attrait important pour une maison résidentielle de ce siècle est qu’on peut y habiter tout au long de l’année avec l’intégration de la climatisation et du système de chauffage non visible qui se trouve dans le plafond. (Rainier, p.61-65)
La maison sur la cascade de Frank Lloyd Wright réalisé quelque temps avant le projet Mairea a été une source d’inspiration pour Aalto dans la création de la villa. Tout comme Wright, la résidence finlandaise s’inspire et s’intègre à la nature environnante. Les jeux de formes sont aussi observables dans les deux projet.
L’image principale est un dessin architectural sur papier du plan final du rez-de-chaussée de la villa. Nous pouvons voir que les fondations sont faites en forme de L, une des caractéristiques principales de cette maison. Nous pouvons observer un jeu de contraste des formes et des matériaux dans cette image. En effet, les murs extérieurs sont droits et angulaires tandis que certains murs intérieurs possèdent des courbes ou sont amovibles puis le gabarit de mesure diffère à chaque pièce. Quant au sol, nous pouvons voir que la fonction des pièces est délimitée par différents traits. De plus, il y a une hétérogénéité dans le choix et la dimension des matériaux choisis par l’architecte – pierre, planche de bois, carreau de terre cuite, brique. Les murs extérieurs et intérieurs de la villa sont blancs avec des éléments de bois – latte et poteau, de brique et de brique. La construction des cloisons est en partie faite à partir d’ossatures métalliques, de maçonnerie de briques perforées et de bois. Une utilisation du bois notamment de teck et de pin finlandais avec du crépi grossier et du schiste sont apparente sur la façade de la villa. Des épaisses cloisons mobiles glissantes sont installées sur un revêtement de feutre dans la salle de séjour. Elles permettaient une modification plus efficace des tableaux ainsi que pour leur rangement. (Table, p.216-217)
Ce plan nous montre l’entrée principale qui communique avec la salle à manger suivie de la cuisine et un bureau. À gauche de l’entrée se situe la salle de séjour où les différentes occupations sont indiquées à l’aide de la finition du plancher, elle possède aussi une grande fenêtre qui offre une vue dans la cour arrière. Les bureaux du couple sont à l’opposé de la salle de séjour sans pour autant être trop distancé. Ensuite, à droite de la salle à manger, différentes chambres et une salle de bain.
On remarque un prolongement de la pierre à l’extérieur de la villa au niveau de la salle de séjour. Le matériau se retrouve aussi à l’entrée du domicile et à l’accès à l’arrière de la salle à manger donnant sur la cour arrière.
Plusieurs colonnes simples ou doubles sont apparentes sur le plan autant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Elles sont en bois clair et foncé puis de différentes textures. La disposition des colonnes, des lignes et du bois sont des influences de la culture japonaise dont d’Aalto affectionnait. (Alvar, p.88)
L’utilisation des colonnes de bois est un élément de design qui caractérise le travail d’Aalto avec l’appropriation du langage organique des formes dans ses œuvres. Pour la villa, il a réussi à faire en sorte qu’« en s’avançant dans la forêt, l’architecture se transforme partiellement en forêt. En retour, la nature va se domestiquer en entrant dans la maison. » (Rainier p.63). En d’autres termes, son objectif était de créer une symbiose entre l’architecture et la nature qui l’entoure.
La Villa Mairea possède plusieurs fenêtres pour maximiser l’éclairage naturel. Au deuxième étage, des fenêtres saillantes et biaises dans les chambres des enfants du couple. Pour accentuer l’accessibilité de la nature dans son projet, il a installé des fenêtres coulissantes avec une étanchéité au niveau des joints pour la saison hivernale. Des parois extérieures ont été rendues mobiles avec un système de coulisse pour ainsi « ouvrir entièrement la maison sur le jardin ». (Table, p.219)
Bibliographie :
AALTO, Alvar, et al, Villa Mairea, Noormarkku, Finland 1937-39, A.D.A. Edita,1985, 40 p.
AALTO, Alvar, La Table Blanche : Et Autres Textes, Éditions Parenthèses, 2012, 281 p.
JETSONEN, Jari et al., Alvar Aalto Houses, Princeton Architectural Press, 2011, 1er ed., 224 p.
LAHTI, Louna, et Aalto ALVAR, Alvar Aalto, 1898-1976 : Le paradis pour les petites gens, Taschen, 2004, 96 p.
PORPHYRIOS, Demetri, Sources of modern eclecticism on Alvar Aalto, Academy Editions, 1982, 138 p.
RAINIER, Hoddé, Aalto, Paris F. Hazan, 1998, 144 p.