Tout au long de sa carrière, l’architecte Frank Lloyd Wright (1867 – 1959) conçoit certains des espaces considérés parmi les plus innovants des États-Unis.
Parmi ses plus grandes œuvres, il se distingue à travers son style et sa philosophie notamment sa vision sur l’architecture organique. Ses ouvrages portaient sur la notion que l’habitat influence le mode de vie et les personnalités de ses occupants.
Durant la période de la crise financière de 1929, communément appelée la Grande Dépression frappant les États-Unis et le reste du monde, l’architecte développe l’idée du logement abordable qui devint la maison Usonienne. C’est la solution pour l’Amérique post-dépression : construire une maison adaptée à des conditions de vie actuels de l’époque, en offrant à son propriétaire des espaces de vie de grande qualité à coût modéré grâce à ses principes architecturaux.
La maison Américaine à coût modéré
Les modèles Usoniens se manifestent dans la première moitié du 20e siècle. La première conçue est la maison Jacobs en 1936, au Wisconsin. Cette résidence autosuffisante était typiquement visée aux indépendants d’esprit, aux journalistes, aux universitaires et petits hommes d’affaires. Leurs maisons étaient généralement construites pour faire face à de grandes difficultés financières. En effet, Wright encourageait ou attirait des clients qui partageaient un intérêt similaire pour les solutions suivant la crise financière en Amérique. Il concrétise cet intérêt et construit quatre Usonienne en 1939. La maison Rosenbaum à Florence, en Alabama, était l’une d’entre elles.
Ce travail aborde l’origine de la maison Usonienne, avec une emphase plus spécifique mise sur le plan de la maison Rosenbaum, les principes qui sous-tendent le style architectural de Wright et comment ceux-ci se déclinent sur ses nombreuses innovations, éléments esthétiques et ses caractéristiques spatiales.
La maison Rosenbaum
La maison Rosenbaum a été construite pour un universitaire qui, à l’époque, dirigeait une entreprise familiale. John Sergeant, dans son livre Frank Lloyd Wright’s Usonian Houses, la décrit comme « l’exemple la plus pure de l’Usonienne,…combinant tous les éléments standards dans un intérieur mature et spatialement varié. »
La maison est agrandie en 1948, lorsque les Rosenbaum demande à Wright de concevoir des modifications en conséquence de l’élargissement de la famille. Elle est ainsi devenue la première Usonienne à être radicalement modifié.
Caractéristiques spatiales
Le plan compact en L comprend deux ailes : une aile pour le salon et un coin salle à manger en alcôve et l’autre pour les chambres.
La cuisine et la salle de bains sont situées dans l’angle du L : elles sont proches, si bien que la plomberie de la cuisine et celle de la baignoire peuvent être combinées ce qui diminue les couts des tuyaux simultanément.
L’aile de la chambre à coucher de trois pièces se termine par une deuxième salle de bain. Wright supprime le garage en lui substituant un emplacement abrité appelé le « Carport ». Il élimine également le sous-sol et le grenier et intègre le système de chauffage dans le sol en béton pour fournir la chaleur.
Les éliminations mentionnées ci-dessus et l’emplacement des pièces font partie des innovations de Wright pour but de créer un logement abordable.
La combinaison des caractéristiques spatiales appliquées par l’architecte créer une impression d’espace et entraine le sentiment de sérénité, de variété et de sécurité bien reconnu par leurs propriétaires.
Par exemple, la composition du débord intermédiaire du toit (1), entraine le sentiment de sécurité. Son coté technique sert à aérer au cours de l’été ainsi que les plaques recouvertes d’une couche d’asphalte assurent une bonne imperméabilité. L’utilisation de l’asphalte émane alors, un sentiment de protection.
Également, la disposition de l’éclairage créer par l’utilisation des fameux « docks » de l’architecte américain (2), sont une composante importante pour l’intérieur. Ces rebords plats de construction en bois ruissellent à travers les espaces principaux à la hauteur des portes et permettent de transporter le système d’éclairage à différents moments de la journée. Le même endroit peut sembler très différent, avec des rayons de soleil semblant apparaître dans des endroits inattendus ce qui provoque ainsi, une impression d’espace.
C’est par la disposition de l’éclairage et par la façon d’utiliser les baies, qui contribuent principalement à l’expérience spatiale et la création d’un champ visuel élargi donnant sur la cour intérieure.
L’usage des baies permet un dégagement visuel qui donne lieu à un positionnement centralisé que Wright nomme « the workspace ». Cette innovation permet à la femme d’amener à manger à table sans moindrement se déplacer, rejoindre la conversation avec ses invités et regarder ses enfants jouer sur la terrasse.
Analyse du plan: quatre étapes
La maison est dérivée en quatre étapes à partir d’un schéma spatial général partant du haut, qui se transforme graduellement et qui se termine avec un plan détaillé. Le plan de Wright démontre comment, par étapes, les éléments différents de la maison sont amenés à interagir et se développer ensemble toute en étant guidés par les principes d’une architecture organique.
La première étape se comporte de l’assemblage général des composants résiduels.
La deuxième étape regroupe les éléments pour qu’ils correspondent à leurs fonctions et les réaligner pour s’adapter à la circulation. Par exemple, les paravents en bois et les piliers en maçonnerie sont regroupés et ajoutés pour but d’enfermer l’espace et séparer la rue et les côtés du jardin de la maison.
Les sols, les toits et les murs sont coordonnés pour désigner leurs rôles individuels d’extension spatiale et d’abri et à la fois pour les disposer en tant que systèmes se consolidant avec les composants résiduels.
La troisième étape déplace, plie et décale le plan de l’ensemble, jusqu’à ce que tous les éléments soient légèrement asymétriques et que l’ordre linéaire soit désengagé en diagonale. Cette procédure suggère la limite du plan et le maintien lisible et cohérent.
L’étape finale ajuste et complète les éléments du plan ajouté d’un grain plus fin. C’est ainsi, alors que les quatre plans s’intègrent dans un même ensemble et en résulte le plan final.
Analyse du plan: La grille simplifiée
Le plan se compose également d’un système de dimensionnement sous l’appellation de « la grille simplifiée ».
Cette grille, qui se compose d’un champ tridimensionnel de lignes de quadrillage est apparue sur le dessin de l’architecte ainsi que sur le sol en béton lui-même. Elle livre la possibilité au constructeur de localiser facilement l’emplacement des murs et des vitrages. L’ensemble du fonctionnement du plan et sa forme visuelle découlent de ces grilles tout en rendant le schéma simple et concis à consulter. La grille simplifiée ou « système d’unités » dont Wright faisait allusion, était également devenue le système de dimensionnement : non seulement celui-ci permettait de rationaliser les dessins, mais sans lui, aucun concept d’utilisation de préfabrication hors site n’était possible.
En effet, l’emploi de la grille permet à la nature de dialoguer avec la géométrie de la maison et c’est ce vocabulaire structurel exécuté par Wright qui est essentiel afin de générer une architecture organique.
L’architecture organique : L’idée de construire avec la nature plutôt que contre elle
En somme, le plan et l’analyse spatiale suscitent l’impression que la résidence émane de l’intérieur et c’est pour cette raison que l’essence d’un bâtiment organique ne peut être saisie de l’extérieur. Il faut y accéder de l’intérieur pour saisir sa notion.
L’homme ne conçoit jamais rien de plus élevé que son âme et quand il s’interprète lui-même de l’intérieur, l’expression extérieure qui en résulte vaut tous les paradis qu’il peut imaginer ou désirer. (my testament, 1957, p. 106).
La philosophie derrière le concept d’architecture organique de Wright considérait qu’une maison naît de la rencontre des différents clients, de l’emplacement, du climat et des matériaux, en accord avec l’environnement et les organismes vivants. L’architecture est désormais réfléchie en tant que partie intégrante de l’espace intérieur sous l’effet des formes appropriées à la vie et aux circonstances.
L’architecture organique, telle que définie par Wright, repose sur les principes fondamentaux ci-dessous :
La parenté entre le bâtiment et le sol
Wright se débarrasse des hauteurs inutiles. Il diminue la hauteur des pièces sous le plafond pour dit-il, l’adapter à une taille normale, à l’occurrence de la sienne. Elle est ainsi adaptée à l’échelle humaine. Mais pour réaliser cette structuration, l’utilisation d’équipement moderne de l’époque tel que la machinerie et nouveaux outils, sont nécessaires. Ces matériaux attribuent la possibilité d’une construction naturelle de l’intérieur vers l’extérieur, toute en utilisant l’échelle humaine.
La décentralisation : l’alliance entre la ville et la campagne
Le choix du site est primordial. La présence du paysage naturel est déterminante pour ainsi interagir éventuellement avec le reste des principes.
Le caractère du site est d’une importance fondamentale pour la conception organique.
Le Caractère
Le bâtiment doit explicitement exprimer sa destination.
Par exemple, la forte horizontalité extérieure donne un sentiment de repos et d’aisance avec son emplacement.
Le style est donc en conséquence du caractère.
La Troisième dimension (ou épaisseur)
Ce principe ce remarque notamment par l’utilisation de la grille simplifiée démontrant la dimension spatiale, ce qui permet la compréhension des profondeurs internes de l’espace. Elle est un élément architectural et structurant du projet.
L’espace
L’espace trouve son expression architecturale en raison des méthodes et des formes nouvelles qui donnent un caractère et une véritable signification à toute structure moderne.
La forme
Dans sa forme achevée, la maison contenait de nombreuses innovations. Ces dispositions pratiques rendent les proportions spacieuses ayant à la fois une belle allure et un prix relativement abordable. Parmi ces innovations, on note tout particulièrement les murs, constitués en grande partie de baies vitrées et qui sont minces et légers. Ils sont désormais des éléments intégrés, au même titre que les yeux font partie du visage et sont en mesure de prendre des formes fascinantes.
Les Matériaux
Un matériau bien choisi peut déterminer le style. Chacun d’entre eux a une signification en fonction de sa propre nature. L’usage de matériaux naturels tels que le bois, la brique, le ciment, le papier et le verre est nécessaire afin d’établir la notion de nature à l’intérieur de la maison, au même titre qu’à l’extérieur. Cette usage peut à la fois faciliter la planification générale et déterminer son caractère. Par exemple, avec l’utilisation du bois, le parfum et la texture de ce matériau évoquent la forte impression de « libérer les occupants ».
L’abri
Le bâtiment est finalisé comme un abri. Il a pour but de protéger les occupants à l’intérieur du froid, de la lumière, la chaleur, de l’usure, de la dégradation et du vieillissement. Les bâtiments ne dépendent pas de la machinerie (système d’air climatisé) pour atteindre le confort, ils doivent réagir en lien avec la nature. C’est une opportunité pour l’abri de travailler dans des conditions naturelles.
En dernière analyse, les innovations exécutées par Wright sur l’ensemble du plan telles que : l’élimination du sous-sol et du grenier, l’intégration du système de chauffage dans le sol, le rapprochement des pièces ainsi que la création du « Carport », résulte une grande diminution des coûts, ce qui permet au logement d’être abordable.
Entre autres, l’utilisation de la grille simplifiée et l’emploi des quatre étapes pour le plan final de la maison Usonienne sont essentiels afin de témoigner son style ainsi que sa philosophie. Puisque le plan et l’analyse spatiale suscitent l’impression que la résidence émane de l’intérieur, c’est en abordant les principes de l’architecture organique définie par Wright qui aura pour but d’offrir une compréhension approfondie sur l’intérieur de la maison Rosenbaum.
Bibliographie
PHOTO 1
Perspective drawing of the southern façade of the Rosenbaums’ Usonian House, Florence, Alabama, dated September 10, 1939.
Source: Usonia – Frank Lloyd Wright’s design for America
Alvin Rosenbaum foreword by Frederick Gutheim
The preservation press National trust for historic preservation,
Washington D.C, 1993, p.161
Crédits: The Frank Lloyd Wright Foundation
PHOTO 2
1939. Maison Rosenbaum, Florence (Alabama). Plan
Source: Frank Lloyd Wright, Testament
traduit de l’anglais et présenté par Claude Massu
Éditions Parenthèses, 2005, p.145
Crédits: The Frank Lloyd Wright Foundation, Scottsdale, az.
PHOTO 3
1.Débord intermédiaire du toit 2.Docks
Source: Frank Lloyd Wright’s Usonian houses-The case for organic architecture by John Sergeant
Whitney Library of design, an imprint of Watson-Gutpill publications,
New-York,1984, p.92
Crédits: 1976 by The Frank Lloyd Wright Foundation
PHOTO 4 & 5
Maison Rosenbaum, Florence, Alabama, 1939
Source: Frank Lloyd Wright – l’intégrale
Alan Weintraub, Kathryn Smith
Éditions du Chêne
France, 2009, p.219
Crédits : photographies par Alan Weintraub
PHOTO 6-9
(center) 6.8b. Stanley Rosenbaum House, Florence, Alabama, 1939
source: Frank Lloyd Wright – A primer on architectural principles
Robert McCarter, Editor Princeton Architectural Press and the authors, New-York, 1991, p.166
Crédits: Diagrammatic analyses by Archie Mackenzie (utilizing AGS software) with Kevin Hakman
PHOTO 10
Rosenbaum house floor plan
Source: Frank Lloyd Wright’s Usonian houses-The case for organic architecture by John Sergeant
Whitney Library of design, an imprint of Watson-Gutpill publications,
New-York,1984, p.43
Crédits: 1976 by The Frank Lloyd Wright Foundation
CITATION
L’homme ne conçoit jamais rien de plus élevé que son âme et quand il s’interprète lui-même de l’intérieur, l’expression extérieure qui en résulte vaut tous les paradis qu’il peut imaginer ou désirer. (my testament, 1957, p. 106).
Source : Frank Lloyd Wright, Testament
traduit de l’anglais et présenté par Claude Massu
Éditions Parenthèses, 2005, p.106
Crédit : The Frank Lloyd Wright Foundation, Scottsdale, az
PHOTO 11
The Rosenbaum house, exterior, Florence, Alabama, 1939.
Source: Frank Lloyd Wright’s Usonian houses-The case for organic architecture by John Sergeant
Whitney Library of design, an imprint of Watson-Gutpill publications,
New-York,1984, p.42
Crédits: 1976 by The Frank Lloyd Wright Foundation
PHOTO 12
Maison Rosenbaum, Florence, Alabama, 1939
Source: Frank Lloyd Wright – l’intégrale
Alan Weintraub, Kathryn Smith
Éditions du Chêne
France, 2009, p.218
Crédits : photographies par Alan Weintraub
INFORMATIONS
Frank Lloyd Wright – l’intégrale
Alan Weintraub, Kathryn Smith
Éditions du Chêne, France, 2009
Frank Lloyd Wright’s Usonian houses-The case for organic architecture John Sergeant
Whitney Library of design, an imprint of Watson-Gutpill publications, New-York,1984
Frank Lloyd Wright, Testament
traduit de l’anglais et présenté par Claude Massu
Éditions Parenthèses, Marseilles, 2005
Frank Lloyd Wright – A primer on architectural principles
Robert McCarter, Editor
Princeton Architectural Press and the authors, New-York, 1991
Usonia – Frank Lloyd Wright’s design for America
Alvin Rosenbaum préface de Frederick Gutheim
The preservation press National trust for historic preservation,
Washington D.C, 1993
Sites:
https://franklloydwright.org/site/rosenbaum-house/
https://www.wrightinalabama.com/