« I am going to build a little Gothic Castle », Horace Walpole, 1750
Twickenham, 1749, l’amorce d’une construction mémorable du 18e est entamée. Partant de 119 pages d’écritures descriptives, salle par salle, des constituantes d’une transformation d’un chalet en château familial, Horace Walpole, sans le savoir, initie le Gothic Revival avec la première habitation gothique, Le Strawberry Hill house.
Historien, politicien, écrivain et grand collecteur, les intérêts de ce personnage qu’est Horace Walpole sont explicitement développés au cœur du projet : « it is a small capricius house build to please my own taste » (source).
L’importante collection de Walpole constitue un élément clé de la construction ainsi que de l’analyse proposée. Une collection au goût aristocratique de l’époque, parsemée de pièces exotiques, le ressentit se fait quand à la tentative de rassemblé le visuel de l’histoire anglaise. D’après l’étude des ombres et lumières ainsi que des combinaisons de couleurs, le bâtiment est construit tel un voyage de sensations, partant des obscurités montant vers l’éclairage en passant vers les salles nanties de vues des jardins, vivifiant ainsi les couleurs dans les pièces, nottement par l’entremise de vitraux.
La mutation du bâtiment qui se déroule en plusieurs étapes soit en 1749, 1760, 1772 jusqu’à 1776, prend modèle sur l’érection et la construction de la cathédrale médiévale. Ce bâtiment intrigant possède une multitude d’entrées et est muni d’une décoration extrêmement élaborée, ce qui nous rapporte au dessin analysé. Ce dessin-aquarelle présente une vue en perspective linéaire la Gallery et de son décor détaillé.
La Gallery étant visuellement et architecturalement la pièce de résistance de la maison, la galerie est aujourd’hui la salle la mieux conservée et restaurée, et ce, notamment garce à cette reproduction dessinée. Massivement recouverte d’or, Walope situe la pièce comme étant au sommet de la réussite du bâtiment, commentant sur celle-ci « I begin to be ashamed of my own magnificence » dans une lettre adressée à George Montagu en date du 1er juillet 1763.
Cette galerie se trouve donc à être une excellente synthèse, reflétant l’ensemble du projet dans lequel Walople prend à cœur l’inclusion de sa collection au sein de la construction du bâtiment, dépassant ainsi la simple fonction décorative en ajoutant au style moyenâgeux par des références à l’histoire. De plus, le dessin illustre, avec la précision et la chromaticité de l’aquarelle, comment Walpole a su « gothiciser » la salle par les nombreuses caractéristiques en référence au style.
D’une part avec la présence frappante de voûtes en éventails nervurées faisant échos à la Cathédrale Peterborough (L’abbaye), emblème du gothique anglais). Ensuite dans le rappel des caractéristiques extérieures, des moulures ornementales en ogives, des tours et des flèches décoratives qui font appel aux cathédrales gothiques. Finalement, la surcharge décorative met l’accent sur l’effet provoqué, effet tant recherché par Walpole. C’est ainsi que cette aquarelle de par son effet créé et sa précise illustration des composantes, s’accorde avec le projet d’architecture en ouvrant la voie au renouveau gothique dans une démonstration de connaissance du style d’origine.
En ce qui concerne le dessin, « The Gallery at Strawberry Hill » est une commande de Horace Walpole. Réalisée en 1781, elle résulte du travail de Thomas Sandby (architecte et dessinateur), Paul Sandby (Peintre et graveur) et est complété par Edward Edwards (Peintre). Cette collaboration n’est pas événement unique dans la conception du projet. En effet, Walpole s’entoure d’une vaste équipe composée d’architectes, de peintre, de graveurs, etc. Une importante quantité de lettres de correspondance ont permis de situer l’équipe plus intime au projet que Walpole nommait le « Committee of taste » qui eut une grande influence sur l’esthétique finale du bâtiment.
« If Walpole and his friends can ‘gild the dream of life’, then Strawberry Hill is a kind of fantasy world that these men share. And if the house can ‘soften the decays of the age’, as in Walpole’s case it did, then what better way to expend the energy of his middle years. Walpole’s happiness here suggest how dearly he held this house and how much it finally meant to him » (Snodin, 2009, p.83)
Ainsi, l’historique de ce dessin montre un lien fort avec le projet dans lequel Walpole déléguait de façon logique, des tâches précises à des exécuteurs spécialistes, pour assurer un rendu précis et véritable d’un projet d’envergure tel que Strawberry Hill.
L’analyse de ce dessin s’avère tout à fait intéressante dans une optique d’observation de l’influence du gothique dans une salle synthèse du projet d’architecture. Comme mentionné plus haut, l’aquarelle ajoute à cet effet de bâtiment lumineux, employant des teintes colorées pour créer des effets d’ombres et de lumières observables particulièrement au niveau du sol. L’utilisation de l’aquarelle dévoile une texturation des matériaux qui, additionnée au dessin, permet le dévoilement d’un rendu véridique et d’une meilleure analyse des éléments architecturaux gothique. Bref, une animation du dessin vient confirmer « l’effet » ressentit lorsque le visiteur pénétrait la pièce.
Enfin, cette propriété de 46 acres, même si considérée comme une Villa (n’étant donc pas occupée annuellement), aura une influence majeure dans l’architecture domestique, en intégrant le style gothique dans l’habitation, ouvrant ainsi à une infinité de possibilités de citation du passé en architecture et par la même occasion de l’intégré à l’habitation moderne. C’est donc par Strawberry Hill qu’Horace Walpole posera le premier pas vers le Néogothique, tout en laissant une trace historique, encore visible aujourd’hui.
Bibliographie sélective
CLARKE, Stephen, « ‘Lord God! Jesus! What a House!’: Describing and Visiting Strawberry Hill », Journal for Eighteenth‐Century Studies, septembre 2010, vol.33, no. 3, p.357-380.
KATZ, Sarah, R., Samuel H. Kress Foundation, Strawberry Hill: A Landscape Study with Recommendations for Restoration, University of Pennsylvania Program Historic Preservation, 2007, 292p.
SILVER, Sean, R., « Visiting Strawberry Hill: Horace Walpole’s Gothic Historiography », Eighteenth Century Fiction, 2009, vol. 21, no 4, p.535-564
SNODIN, Michael, Horace, Lewis Walpole Library et Albert Museum, Walople’s Strawberry Hill, Yale Center for British Art, 2009, 368 p.
The Lewis Walpole Library, Yale Universy, Horace Walpole’s Strawberry Hill Collection, 2009, En ligne <http://images.library.yale.edu/strawberryhill/index.html >. Consulté le 14 février 2020.