Brinkman, la collectivité et l’intermédiaire

Les dessins faits aux échelles 1:200 et 1:100 ont été tirés d’un ouvrage sur Brinkman & Van der Vlugt. Ils font partie d’un portfolio de 10 feuilles comprenant d’autres plans et coupes à l’échelle. Par leur finie et texture, ils semblent avoir été finie à l’encre cependant l’ouvrage ne cite ni les sources ni les origines de cette documentation architecturale. en observant le dessin de rez-de-chaussée, quelques subtilités sont remarquables par leur évocation du commun centrale. La périphérie, opaque et continue est en contraste à la surface intérieure flexible, perforée et organique. Cette perforation de la surface intérieure tant au rez-de-chaussée qu’à l’étage évoque l’entre-deux intermédiaire dont Brinkman avait la volonté d’articuler pour humaniser le projet. Ces perforations se continuent jusque dans les jardins qui sont divisés en mini parcelles rejointes par ce qu’on peut lire comme trottoir. À l’étage, ces la « streets in the air » qui aiguille sur la collectivisation de l’espace. Outre les détails formels, l’idée de mettre quelques arbres sur le plan directeur ne fait qu’embellir le dessin alors qu’on distingue à peine les espaces automobiles, c’était secondaire pour Brinkman.

Dans les années 20, la ville de Rotterdam souhaitait développer son parc immobilier central dans le but d’éviter une course des promoteurs spéculatifs vers les banlieues (Lemba, 1999). C’était l’ingénieur ambitieux, August Plate, un grand admirateur de Hendrik Berlage, qui était le directeur du Rotterdam Municipal services (Molenaar, 2012). C’est dans ces années, en 1919 que Michiel Brinkman reçu la commission des construire des logements d’ouvrier. Brinkman considerait subtil la qualité spatiale d’avoir les logements connectés par les corridors gallerie à l’intérieure d’une cour, cependant, plusieurs autres avis publiques pensait que ce geste briserait des liens dans la fabrique urbains (Sherwood, 2001).

«  The architect, of course, has never been very human: throughout history he always served the happy few and never the great number. Since building cost money, he was always in the side of money: the wrong side. He has occupied himself with pyramids, temples, cathedrals, palaces, and office buildings and more often allowed himself to be exploited as a tool for repressing people, than to liberate themselves.« 


Hertzberger, H. (August 71). Looking for the breach under the pavement. RIBA Journal, 78(8), 330.

Avec un plan simple et évocateur d’une collectivité et d’un commun partagé, Brinkman a précédé ses collègues contemporains et des générations suivantes avec le design des logements d’un îlot de Spangen, Rotterdam. Le projet, pour lequel il a reçu la commission de concevoir deux îlots, fut ultimement un bloc rectangulaire de 470′ x 260′ occupant les deux îlots, avec des bâtiments de 4 étages. Dans le concept du projet présenté au conseil des logements de Rotterdam, l’espace privé rencontre les espaces communs par des transitions intermédiaires encore progressives aujourd’hui. L’architecte envisageait un espace unifiant (Lemba, 2001). Les plans et dessins évoquent un vivre ensemble par des géométries organiques illustrant la volonté de l’architecte de dénouer avec une tradition des développements d’îlots périphériques. À l’époque du développement du polder, en 1903, le plan maître de J. De Jonque promouvait les logement à plans périphériques et à haute densité (Lemba, 1999). Brinkman voulut rompre avec cette pratique en renversant les orientations pour alimenter une cour intérieure. Cette expérimentation de Brinkman fut d’avant garde puisque dans le même quartier, J.J.P. Oud à lui-même conçut les plans pour des logements avec une orientation périphériques (Lemba, 1999). Selon Brinkman, c’était plus esthétique, pratique et hygiénique d’avoir une cour intérieure que des périphériques fermés sur des îlots étroits (Molenaar, 2012). Le Justus van Effen a été l’un des premiers exemples de logement à étages multiples avec accès par galeries partagées sur cour.

Dans un article publié dans le RIBA Journal, Herman Hertzberger considérait que les «  gallery street  » de Spangen avait plus a offrir que toute autre rue résidentielle conçue jusqu’à ce moment. Selon ses observations, les résidents de Spangen ont des contacts sociaux d’un degré jusqu’alors jamais égalé. “… «and it becomes perfectly clear what the absence of traffic implies.  ». Un des objectifs de Brinkman était de réhabiliter la connexion traditionnelle qui existait entre la maison et la rue, ce qui avait disparu des logements sociaux de l’époque. Il a de plus visé à ce que les entrées principales des maisons ne soient pas à proximité des cages d’escalier, évitant ainsi les regards indésirables (Molenaar, 2012).

L’aile centrale transversale contient les services communs tels la buanderie, les bains, les systèmes de chauffage avec les espaces de jeux pour enfant sur le toit. L’accès principal aux logements se fait par la cour intérieure. Un réseau de rue pédestre, divisé en jardins privés par des allées piétonnes menant à chaque maison connecte l’intérieur des cours aux portiques d’entrées, aux ascenseurs et aux escaliers. L’orientation globale de l’îlot et de la cour Est-Ouest était pour favoriser des heures d’ensoleillement plus longues. Cette orientation rendue possible, ce qui était la volonté de Brinkman, soucieux d’un environnement sensible aux éléments, que plusieurs logements aient leur salon du côté sud (Molenaar, 2012). On accède à ces courts sur deux axes dont la principale qui est interrompue par le bâtiment de service central. Cette interruption volontaire permet de bloquer ou ralentir la circulation, mais est aussi une pause visuelle réduisant l’échelle du complexe à l’échelle humaine. Pour Brinkman, qui était un membre actif du mouvement théosophique hollandais, l’observation et le respect des gestes simples du quotidien étaient une voie par lesquels la transformation de la société était possible (Lemba, 1999).

Parmi les espaces collectifs et communautaires, les bains et buanderies étaient les plus progressifs à l’époque.
Molenaar, J., Dicke, M., & Linders, J. (2012). Brinkman & Van der Vlugt Architecten : Rotterdams city-ideaal in international style. Nai010 uitgevers.

Les immeubles sont divisés en quatre étages de haut. Au rez-de-chaussée et deuxième étage sont des logements à trois chambres, de même qu’au troisième et quatrième étage. Du côté de la rue, les bâtiments sont principalement hermétiques avec très peu d’ouvertures. L’accès au troisième étage est par la galerie ou « street in the air » donnant sur les cours intérieures et articulées de façon dynamique laissant libre cour aux enfants d’y circule en vélo, vendeur itinérant de monté leur charette ou les voisins de s’y joindre pour une conversation (Sherwood, 2001). La galerie est accessible par un ascenseur. À l’époque, les logements de Birkman dans le quartier Spangen étaient un tour de force dans leurs anticipations des tendances et aspirations à venir en logement collectif. Ils précédaient Moisei Ginzburg’s Narkomfin, 1928 à Moscow, Le Corbusier, Unité d’habitation, et celle de l’Angleterre des années 50 et 60 telles la Golden Lane et Robin Hoods (Sherwood, 2001). L’effort que Brinkman a porté pour la connectivité et proximité des résidents les uns aux autres et avec l’environnement local était entièrement absent dans le Robin Hood (Fernandez, 2013), il fut démoli, alors que Justus van Effen est devenue un modèle exemplaire de conservation et renouvellement urbain (van Emstede, 2011).

Le bâtiment central contient le coeur du projet tant dans sont utilité que dans les aspirations holistiques que Brinkman tentait de pousser avec les idéologies collectives. Pour l’architecte, la cour intérieure avec les salles de bains au son centre était perçue comme une centralité remplie de partage interconnecté dans lequel le degré de fraternité recherché par le Théosophiste qu’il était pouvait être matérialisé. À Justus van Effen, Brinkman visait à créer une sorte réaliste sociale et promouvoir les contacts sociaux (Lemba, 1999). 

Les « streets in the air », doutées par les autorités municipales (van Emstede, 2001) et finalement fort appréciées des résidents.
Molenaar, J., Dicke, M., & Linders, J. (2012). Brinkman & Van der Vlugt Architecten : Rotterdams city-ideaal in international style. Nai010 uitgevers.

Fernández Per, A., Mozas, J., Ollero, A. S., Mortimer, K., a+t research group. (2013). 10 stories of collective housing : Graphical analysis of inspiring masterpieces. a+t architecture publishers.

« The invisible world in which beauty lies hidden must again be able to establish contact with the regions in which everyday temporary happenings take place. . . . Everyday life should be interwoven with beauty to such an extent that there is no room for the idea of ‘art.’ For that, art is too special, it limits the domain of beauty. »

AUGUST PLATE
BAKEMA, 1960

Pour des membres du concile municipal, le Justus van Effavait été anticipé comme de simples logements d’ouvrier avec des conditions de vie médiocre et des situations sociales indésirables (van Emstede, 2011). Au terme de la construction, le complexe a su impressionner, voir même être révolutionnaire et apprécier comme exemple de modernité (van Emstede, 2011). En 1925, Brinkman est décédé. Dans plusieurs de ses nécrologies l’îlot de Spangen était référé comme étant parmi ses meilleures réalisations (van Emstede, 2011).   Sa célébrité continua à grandir au sein des architectes et était reconnue comme un des meilleurs exemples de logement sociaux, inspirant aussi le concepteur de la première tour d’habitation de Rotterdam (van Emstede, 2011). La conception des logements de Spangen a marquée un tournant dans l’architecture de logement public. Alors qu’à l’époque la voiture automobile s’imposait à l’urbanité, morphologie et habitat, le Spangen est en quelque sorte une résistance et le début subtil d’une nouvelle approche, plus humaine, consciente et assumé.

Bakema, J.P. “A house for 270 families in Spangen,” Forum 15 (1960-61)

Fernández Per, A., Mozas, J., Ollero, A. S., Mortimer, K., a+t research group. (2013). 10 stories of collective housing : Graphical analysis of inspiring masterpieces. a+t architecture publishers.

Hertzberger, H. (August 71). Looking for the breach under the pavement. RIBA Journal, 78(8), 330.

Lemba, K. (1999). Abstraction and theosophy : Social housing in Rotterdam, the Netherlands. Architronic, University of North Carolina

Molenaar, J., Dicke, M., & Linders, J. (2012). Brinkman & Van der Vlugt Architecten : Rotterdams city-ideaal in international style. Nai010 uitgevers.

Sherwood, R. (2001). Modern housing prototypes. Harvard Univ. Press.

van Emstede, C. (2011). The Heritage Significance of the Justus van Effen Housing. ICOMOS Paris 2011.

Spangen—Wikipedia. (s. d.). Consulté 26 février 2020, à l’adresse https://en.wikipedia.org/wiki/Spangen

One thought on “Brinkman, la collectivité et l’intermédiaire

  1. Christina Contandriopoulos

    Votre remise préliminaire est complète et bien écrite mais je vous encourage à approfondir votre analyse sur le dessin du plan d’ensemble. Quelle est l’échelle? Le média? La traduction du titre? Quelles stratégies graphiques évoquent la « collectivité et d’un commun partagé »? C.

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