L’Art nouveau est un mouvement artistique qui s’est implanté en Europe entre les années 1890 et 1910. Ce mouvement artistique touche de nombreux arts dont l’architecture. Victor Horta est l’un des premiers architectes à se lancer dans ce nouveau style à Bruxelles avec la création de l’hôtel Tassel en 1894. C’est une de ses premières architectures et plus précisément, sa deuxième résidence en tant qu’architecte puisqu’il en avait fait une auparavant pour son ami, Eugène Autriche.
À son tour, Émile Tassel demande à Victor Horta de lui créer une résidence sur un terrain mesurant 7,20 mètres en façade et 35 mètres en profondeur (Borsi, 1970, p. 54). M. Horta commence par faire un plan qui ne sera publié qu’en 1895.
Pour l’architecte Victor Horta, chaque maison est un portrait. La maison doit donc refléter le client et répondre à ses besoins. Dans ce cas-ci, le client est Émile Tassel, un professeur de géométrie à l’Université de Bruxelles. Ce dernier accorde donc une grande importance à sa vie professionnelle et aux salles qui s’y rattachent. M. Horta dessine donc les plans d’une maison bourgeoise, adaptée aux besoins et au mode de vie de son propriétaire, en sachant cela.
Le dessin de l’Hôtel Tassel comporte cinq plans désignant chacun un étage de l’établissement comme il est indiqué sur le papier. Sur chacun des cinq dessins, Victor Horta a pris le temps de marquer la fonction de l’espace dans sa langue maternelle, le français. Il a aussi marqué les espaces où il y aurait un « dégagement », c’est-à-dire un espace libre ou encore un passage où les gens pourront circuler d’une pièce à l’autre.
Le premier plan représenté est l’étage souterrain. Cet étage est particulièrement utilisé par les domestiques même si ceux-ci ne vivent pas dans cette maison puisqu’aucune chambre ne leur est attribuée. Les boissons, les vins, la laverie, le garde-manger, la cuisine, la prise d’air et l’espace de dégagement composent ce premier plan. Un système de chauffage est prévu lors de la création puisqu’il y a un espace réservé à la chaudière et au charbon.
Le deuxième dessin représente l’entresol situé entre le rez-de-chaussée et le premier étage à l’avant de la maison. C’est le plus petit étage de la maison puisqu’il sert essentiellement de transition entre deux étages et il ne comporte que quatre pièces. Le laboratoire permet au professeur de continuer ses recherches en dehors de l’université. Sur le même étage, un fumoir lui permet de prendre des pauses sans avoir à sortir à l’extérieur et d’inviter quelques amis à le rejoindre à pratiquer cette activité typiquement masculine. C’est aussi le seul étage de la maison qui possède une salle de bain ainsi qu’un w.c. sur le même étage.
Le troisième dessin représente le deuxième étage. Une grande salle d’étude se situe à l’avant-plan de la maison. Un couloir permet d’avoir accès aux autres pièces de l’étage. Il y a un vide-cours et deux chambres du côté gauche. Du côté droit, on trouve le cabinet et un lanterneau en vitre qui permet à la lumière naturelle de pénétrer dans la maison. Le lanterneau permet d’aérer et de faire sortir la fumée. C’est un ventilateur en quelque sorte. À l’arrière de la maison, dans le demi-décagone, il y a une plate-forme.
Émile Tassel aime recevoir des personnes pour partager sa passion de la photographie, par exemple, il a donc besoin de pièces pour recevoir ses invités. Le rez-de-chaussée a donc été conçu pour ce besoin. La porte est située au centre de la façade, ce qui est différent des autres habitations domestiques de Bruxelles où la porte est généralement située sur le côté droit ou gauche. En arrivant par le porche, l’invité entre dans un vestibule de forme octogonale. Ce vestibule lui permet d’avoir accès au vestiaire, aux w.c., au jardin d’hiver, aux escaliers et au parloir. À l’arrière-plan et loin des bruits de la rue, il y a des pièces plus privées tel que le salon, la salle à manger, l’office ainsi qu’un escalier de service qui permet aux domestiques d’avoir accès aux autres étages sans prendre l’escalier principal.
Le premier étage est composé d’une chambre à coucher, d’une toilette, d’un escalier et une cage d’escalier. On y trouve aussi un bureau qui était l’élément le plus important pour Émile Tassel (livre). Victor Horta fait son dessin en sachant que le bureau devait se situer au centre de son projet d’architecture. Il installe le grand bureau au premier étage face à une fenêtre connue sous le nom de « bow window » en anglais. Celle-ci, décorée de pierres ocres et bleues, commence à l’entresol et va jusqu’au deuxième étage. De petites fenêtres sont de chaque côté de cette fenêtre principale et d’autres sont situées à l’arrière. Il n’y a donc aucune fenêtre sur les côtés droit et gauche de la maison. Victor Horta installe donc des puits de lumière au premier étage et au deuxième étage pour que la lumière naturelle éclaire une grande partie du bâtiment.
Ces puits de lumière permettent de créer un jardin d’hiver en plein milieu de la maison. D’autres puits de lumière se trouvent au troisième étage, c’est-à-dire dans les greniers qu’on ne voit pas sur le plan original de Victor Horta, mais qu’on voit dans celui de Jean Delhaye qui a restauré l’Hôtel Tassel entre 1982 et 1985. La luminosité est donc un élément central de l’architecture de cette résidence domestique bruxelloise.
L’escalier crée une division entre l’avant et l’arrière de la maison. Les pièces destinées au travail et à la réception sont devant tandis que l’arrière est consacré à la vie privée. On peut d’ailleurs imaginer que ces pièces ouvrent sur un jardin que les plans ne précisent pas toutefois. Le grand escalier est dessiné en courbe, ce qui concorde avec le style des futurs meubles et la décoration de la maison puisque Victor Horta pense aussi à ces éléments lorsqu’il conçoit un plan. Les balustrade de l’escalier auront des formes florales fabriquées en fer forgé. D’autres matériaux seront utilisés dans cette architecture telle la mosaïque pour créer des motifs au sol comme dans le hall d’entrée, le marbre et la fonte.
Pour conclure, ce plan est important puisque c’est une des rares traces du travail de Victor Horta qui nous reste puisque ce dernier a détruit une grande partie de ses dessins. L’Hôtel Tassel fait partie de la liste du patrimoine par l’UNESCO puisqu’elle représente l’architecture la plus aboutie du style art nouveau à Bruxelles depuis 2000. Selon Jean Delhaye, « [a]vec l’hôtel Tassel, Horta invente une architecture qui n’emprunte plus rien du passée: c’est la première architecture moderne qui rompt avec la tradition de l’accumulation de pièces en enfilade. » (Loyer, 1986, p. 36)
BIBLIOGRAPHIE
AUBREY, Françoise. Victor Horta à Bruxelles, Bruxelles : Éditions Racine, 1996, 143 p.
BORSI, Franco. Victor Horta. M. Vokaer. 1970, 196 p.
LOYER, François, Victor Horta hôtel Tassel : 1893-1895, Archives d’architecture moderne Bruxelles, 1986, 150 p.
MAZARAKY, Sylvie. L’Art nouveau: passerelle entre les siècles et les arts. Éditions Racine, 2006, 15-16 p. En ligne. < https://books.google.ca/books?id=YJjL9yNmjooC&pg=PA15&lpg=PA15&dq=victor+horta+citation&source=bl&ots=MSs4UOQR-p&sig=ACfU3U0jhwpiZJGhB8K5plL4NdnlOo2C-A&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwj0tvbjwuDnAhVAmHIEHWxdBBE4ChDoATAGegQICBAB#v=onepage&q=victor%20horta%20citation&f=false >. Consulté le 2 mars 2020
MESNIL, Christian. Victor Horta un maître de l’Art nouveau : sa vie, son oeuvre. Braine-l’Alleud J.-M. Collet. 1990. 95 p.